Livres pour enfants : des retouches dans les rééditions de Roald Dahl créent l’indignation au Royaume-Uni – Monde
Les nouvelles éditions des livres de Roald Dahl, auteur britannique pour enfants, vont être modifiées pour supprimer le vocabulaire risquant d’être considéré comme offensant, un lissage de l’œuvre originale qui suscite indignation et consternation.
Les références au poids, à la santé mentale, à la violence, ou aux questions raciales ou de genre ont été expurgées et réécrites, selon le quotidien conservateur Daily Telegraph.
Ainsi, le terme « gros » n’est plus employé pour décrire Augustis Gloop de « Charlie et la Chocolaterie ». Les « hommes-nuages » de « James et la Pêche géante » deviennent le « peuple nuage ».
Tous les changements sont « réduits et soigneusement réfléchis », a assuré un porte-parole de la Roald Dahl Story company.
« Censure absurde »
« Roald Dahl n’était pas un ange », a réagi, sur Twitter, l’écrivain britannique Salman Rushdie, icône de la liberté d’expression victime d’une violente agression, il y a six mois, « mais c’est de la censure absurde ».
Suzanne Nossel, patronne de Pen America, organisation rassemblant 7 000 écrivains pour la liberté d’expression, a jugé que « l’édition sélective pour faire que les mots de la littérature se conforment à des sensibilités particulières pourrait représenter une arme nouvelle dangereuse ».
Le passage en revue a été lancé en 2020 avant le rachat, en 2021, par Netflix du catalogue de l’auteur pour enfants.
La rédactrice en chef adjointe du journal conservateur Sunday Times, Laura Hackett, a déclaré qu’elle garderait ses éditions originales de Roald Dahl, afin que ses enfants puissent « les apprécier dans toute leur gloire méchante et colorée ».
Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, estime que les mots doivent être « préservés » plutôt que « retouchés », a indiqué son porte-parole, ce lundi, lors d’un point presse régulier.
« Si Dahl nous offense, ne le réimprimons pas », a, quant à lui, estimé l’écrivain Philip Pullman, ce lundi, sur la BBC, soulignant que des millions de ses livres orignaux resteraient en circulation pendant de nombreuses années, quels que soient les changements effectués dans de nouvelles éditions.
Garder « l’irrévérence et l’esprit affûté »
« Lors de nouveaux tirages de livres écrits il y a des années, il n’est pas inhabituel de passer en revue le langage utilisé et de mettre à jour d’autres éléments comme la couverture et la mise en page », a affirmé le porte-parole de la Roald Dahl Company, soulignant la volonté de conserver histoire, personnages, et « l’irrévérence et l’esprit affûté du texte original ».
La Roald Dahl company a, par ailleurs, indiqué avoir travaillé avec Inclusive Minds, un collectif pour l’inclusion et l’accessibilité de la littérature pour enfants.
L’auteur, incontournable dans les bibliothèques de nombreux enfants, est décédé, en 1990, à l’âge de 74 ans.
Fin 2020, sa famille avait présenté des excuses pour les propos antisémites tenus par l’auteur, il y a 40 ans. Le créateur de « Matilda » ou « Le Bon gros géant » avait, notamment, fait des déclarations ouvertement antisémites dans une interview au magazine britannique New Statesman, en 1983, légitimant l’antisémitisme et semblant trouver des justifications aux crimes d’Hitler.