Cyril Hanouna, la ministre de la Culture et les « rageux »
Ceux qui se refusent à regarder Cyril Hanouna et à gonfler son audience de 2 millions de téléspectateurs quotidiens ont tort. C’est presque devenu un soap opera politico-médiatique entre le clan de Vincent Bolloré et celui d’Emmanuel Macron. Chaque jour a sa dose de rebondissements. Et l’épisode du 9 février tient ses promesses.
Il faut voir Cyril Hanouna à l’œuvre, collier en or autour du cou et barbe bien taillée, défendre son émission, Touche pas à mon poste (TPMP), face aux sanctions de l’Arcom (l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), ainsi qu’aux menaces de la ministre de la Culture.
Un peu plus tôt dans la journée, jeudi 9 février, Rima Abdul-Malak critique l’animateur de télévision et le groupe Canal+ qui l’emploie. Elle juge « inadmissible » l’appel à la privatisation de l’audiovisuel public de la vedette de C8, sous le slogan « Privatisez-moi ça ». Dans la soirée, Cyril Hanouna commence étonnamment par adoucir son propos sur France Télévisions et Radio France.
Désormais, il pense juste préférable de « réduire la voilure ». Il ne parle « pas de toutes les chaînes », mais « surtout des radios ». Bon, quand même, France 4, où il a auparavant travaillé, « vu ce que la chaîne diffuse, il vaudrait mieux la fermer », propose-t-il.
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Mais le cœur du conflit entre le gouvernement et le groupe Canal+, filiale de Vivendi, qui emploie Cyril Hanouna, réside ailleurs. Il s’agit de cette nouvelle et grande menace qui plane sur l’autorisation d’émettre de C8, qui doit être renouvelée par l’Arcom en 2025.
Sur France Inter – le service public, comme par hasard, dirait un complotiste –, la ministre de la Culture a tenu à rappeler « le cadre existant ». « Il y a des obligations à respecter. Il y a déjà eu une vingtaine d’interventions de l’Arcom, depuis 2019, pour C8 et CNews. Au bout de combien d’interventions l’Arcom pourra-t-elle dire à quel degré les obligations ne sont pas respectées ? C’est son rôle », a-t-elle martelé. Cette sortie courrouce particulièrement le groupe Canal+, qui émet un communiqué à la mi-journée, ainsi que Vivendi, qui publie également un communiqué, ainsi que Cyril Hanouna.
« On est en guerre »
Première séquence truculente de TPMP : le présentateur s’érige en grand défenseur de l’Autorité de régulation, même si elle vient d’infliger à C8 sa deuxième amende de plus de 3 millions d’euros en moins de quatre ans.
L’Arcom, clame Cyril Hanouna, c’est « quelque chose d’indépendant, et là, la ministre ne respecte pas l’indépendance ». Ce faisant, il reprend l’argumentaire de Canal+, qui se dit « profondément choqué » par la ministre. « En laissant à nouveau entendre que les licences de nos chaînes ne mériteraient pas d’être renouvelées en 2025, alors même qu’elle se refuse de commenter la procédure de renouvellement d’autres acteurs de l’audiovisuel, madame la ministre prend parti, sort de sa réserve et ne respecte pas l’indépendance de notre régulateur sectoriel », s’indigne l’employeur de Cyril Hanouna.
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La chroniqueuse Géraldine Maillet peut-elle ajouter un mot sur la ministre ? Elle demande la permission au maître de cérémonie. Celui-ci exige de se faire chuchoter d’abord à l’oreille les propos qu’elle souhaite tenir à l’antenne. Séquence télé-réalité, ce secret susurré hors micro. Ouf, Cyril Hanouna valide. Géraldine Maillet peut s’exprimer.
Elle trouve que la ministre, « censée représenter toutes les cultures », non seulement méprise Cyril Hanouna, Canal+ et ses actionnaires, notamment Vivendi et Vincent Bolloré, mais aussi « tous les téléspectateurs de TPMP » qui n’ont pas accès à d’autres émissions télévisées. Applaudissements.
On a plus de chances d’être encore là que la ministre.Cyril Hanouna
L’animateur révèle qu’il a tenté de joindre la ministre de la Culture, en vain. Elle ne lui a pas répondu. Il lui a donc envoyé un message texte : « C’est Cyril Hanouna. » Il veut l’inviter à TPMP pour s’expliquer. Mais que ses téléspectateurs se rassurent ! Le renouvellement de diffusion de C8, rappelle-t-il, « c’est pour 2025, et Dieu sait où sera la ministre en 2025. Les ministres changent tellement. On a plus de chances d’être encore là que la ministre. D’ailleurs, elle sera peut-être chroniqueuse. Comme Roselyne Bachelot… »
S’il défend l’indépendance du régulateur face à une ministre qui fait pression, Cyril Hanouna regrette que l’Arcom, en infligeant une amende de 3,5 millions d’euros pour ses propos contre Louis Boyard, ait fait du député « un héros ». « On a pris une grosse amende, mais on continue, on fera l’émission ! » promet-il, avant de lancer : « On est en guerre. […] Tous les aigris ont la rassrah [l’angoisse, NDLR] ; nous, on a la darka [la rigolade]. » Il est prêt à « laisser les rageux commenter ». Cyril Hanouna clôt la séquence en seigneur. Ses 2 millions de téléspectateurs ne regrettent pas d’avoir allumé le poste. Bonsoir, et à demain pour un prochain épisode !